Récemment un article du Figaro laissait entendre que les accords de défense signés entre la France et les Emirats donnait une garantie nucléaire à ces derniers. Quelques blogueurs ont récemment remarqué que le débat sur cette question était assez faible.
C’est que tout d’abord on ne sait pas grand chose pour l’instant ces accords de défense. Et c’est assez gênant, en lisant la constitution pour se rafraîchir la mémoire, il est vite apparent que aussi important soit-il, cet accord peut être ratifié par le Président de la République sans autorisation du Parlement.
Article 53
Les traités de paix, les traités de commerce, les traités ou accords relatifs à l’organisation internationale, ceux qui engagent les finances de l’État, ceux qui modifient des dispositions de nature législative, ceux qui sont relatifs à l’état des personnes, ceux qui comportent cession, échange ou adjonction de territoire, ne peuvent être ratifiés ou approuvés qu’en vertu d’une loi.
Donc conformément à la tradition depuis 1958, il faudra compter sur la bonne volonté du président de la République pour être informé. Celui-ci a promis de faire approuver les nouveaux accords par le Parlement mais en attendant c’est lui et lui seul qui a le pouvoir de les ratifier et il n’a besoin de personne pour cela.
Cela évidemment ne facilite pas le débat. Mais au fond, la question nucléaire n’est qu’un élément d’un débat plus large sur la politique française dans le golfe Persique et plus particulièrement vis à vis des Emirats arabes unis.
En effet, dans la mesure où une base est installée dans ce pays, la garantie nucléaire, au minimum contre une attaque du même type, coule de source. Si l’Iran devait à l’avenir tirer des missiles balistiques équipés d’une charge nucléaire, il paraît claire qu’une riposte nucléaire ferait partie de l’éventail des options disponibles pour le Président de la République. En effet une telle attaque toucherais immanquablement la base française. De fait toute attaque de ce type serait automatiquement une attaque contre la France. En fait la même logique est à l’œuvre si l’Iran utilisait contre les Emirats des missiles balistiques avec des charges classiques ou chimiques. Peu précis, sans doute lancés en grand nombre, le risque qu’il touche la base serait important. Pire encore, la nécessité militaire pourrait peut être contraindre l’Iran à frapper de manière préventive la base française dès le début d’un conflit alors même que l’engagement de la France ne serait peut être pas absolument certain.
A partir de là , on comprend facilement l’importance de cette base pour les Emirats, elle engage la France qui n’aura en pratique guère d’autres choix que de respecter les accords signés même si par ailleurs le gouvernement pourrait avoir des hésitations à ce moment. La France obtient donc un point d’appuis dans une région stratégique, les EAU un allié puissant dont l’intervention est quasi-certaine en cas de conflit.
Cela devrait sans doute faire l’objet d’un débat approfondi mais la question n’est, en tout cas, pas spécifique au nucléaire. Celui-ci est par définition dans l’équation dès le début.